Le metal aime t-il les synthés ?
Dans le cadre du dossier que nous consacrons au son du metal dans KR#372, nous avons demandé à Milan Garcin, co–commissaire de l’exposition Diabolus in Musica, organisée jusque au 29 septembre 2024 à la Philharmonie de Paris, quelle était la place du Synthé dans la musique métallique.
Quel est le lien entre le metal et les synthés ?
Je pense que ça remonte assez loin, en fait. Même Led Zeppelin a utilisé des synthés à un moment donné. Les synthés et les claviers, je les regroupe tous dans la catégorie des instruments synthétiques, pour ainsi dire. Depuis les débuts du metal il y a 55 ans maintenant, il y a eu cette idée d’incorporer des instruments novateurs tout au long de son histoire. Mais c’est vrai que l’utilisation des synthés s’est généralisée depuis les années 2000-2010. On voit même des sous-genres du metal qui se sont formés autour de l’utilisation de ces synthés, comme la Dark Synth. On a des représentants incroyables en France dans ce domaine. La France est connue pour sa musique électronique, et c’est un peu la même chose pour la Dark Synth. Des groupes comme Carpenter Brut ou Perturbator utilisent des synthétiseurs pour créer un son qui emprunte à la fois à la musique électronique, parfois même avec des touches de Eurodance, tout en conservant une rythmique très intense. Ils collaborent évidemment avec des chanteurs de groupes metal et abordent des thématiques très spécifiques propres au metal, comme le memento mori et d’autres symboles similaires. Carpenter Brut, comme son nom l’indique, s’inspire de ce que John Carpenter a fait à une époque et le réinterprète de manière plus musclée.
Est-ce que Dream Theater est considéré comme un groupe de métal ?
Absolument, Dream Theater est un groupe de métal extraordinaire, surtout reconnu pour sa technicité. On pense immédiatement à John Petrucci. En effet, il existe tout un pan du metal appelé metal progressif, avec d’autres groupes comme Porcupine Tree, qui ont développé à la fois une technicité et une compréhension profonde de la musique metal. Dream Theater fait partie intégrante de cette mouvance. Personnellement, j’adore ce groupe. Malheureusement, nous n’avons pas pu les inclure dans l’exposition car nous avons délibérément mis de côté le prog ainsi que d’autres sous-genres comme le doom ou le stoner, pensant que ces styles étaient déjà suffisamment représentés ailleurs. C’était aussi une question d’espace. Mais j’ai découvert quelque chose d’incroyable en préparant l’exposition : à l’âge de 11 ans, John Petrucci a écrit une lettre à Leonard Bernstein lui disant : « Écoutez, M. Bernstein, je trouve que ce que vous faites n’est pas mal, mais je vais faire mieux que vous. » Cette lettre est toujours conservée à la Bibliothèque Nationale aux États-Unis. Je me suis demandé si nous pourrions emprunter cette lettre pour voir comment tout cela interagit. Tout cela pour dire que, en ce qui concerne les synthés en particulier, il y a effectivement des ajouts musicaux dans la musique prog, mais c’est également vrai pour le metal symphonique, où la plupart des arrangements sont faits à l’avance, souvent avec des instruments synthétiques pour des raisons économiques, étant donné que l’utilisation d’un orchestre est très coûteuse. Cela crée tout un écosystème technologique qui permet le développement de nouveaux sous-styles, et Dream Theater, avec son utilisation du clavier, ajoute plusieurs éléments musicaux additionnels.
Jusqu’au 31 juillet 2024, on vous fait fait gagner sur le site de KR des places pour visiter l’exposition Diabolus in Musica à la philharmonie de Paris. Pour participer, ça passe ici
Exposition Metal. Diabolus in Musica
Du vendredi 5 avril au dimanche 29 septembre 2024
Philharmonie de Paris • 221 Avenue Jean Jaurès, Paris 19e
philharmoniedeparis.fr